Former et mobiliser face à l’urgence climatique et sociale, c’était l’objectif des Camp Climat organisés par ANV COP 21 et Alternatiba cet été partout en France. L’un d’entre eux a eu lieu vers Besançon. Le 21 août, PBI y a animé un atelier, avec le CCFD Terre Solidaire, pour aborder les enjeux de la solidarité internationale dans la crise climatique.

L’objectif : permettre aux militant.e.s écolos de saisir les liens entre thématiques environnementales (dont ils et elles sont très conscient.e.s) et droits humains. Marion, chargée de projets chez PBI France et pour qui c’était la première facilitation d’atelier, raconte.

25 personnes, de 14 à 70 ans, en cercle, étaient réunies à 9h30 dans la salle des fêtes du petit village de Port-Lesney qui accueillait le Camp Climat Doubs Jura. L’atelier était complet, preuve que le sujet intéresse. Au centre du groupe, la carte du monde de Peters : une représentation de la planète avec les pôles inversés, et la Nouvelle-Zélande au milieu. L’occasion d’échanger sur sa perception du monde, de remettre en question celui qu’on nous présente dès l’école et de critiquer notre « eurocentrisme » (où l’Europe est toujours au centre de nos représentations).

De nos rapports différenciés au monde

S’ensuit un jeu de rôles, où les 25 participant.e.s incarnent durant quelques minutes une personne dont le travail a un lien direct avec les ressources naturelles. Producteur de soja OGM au Brésil, mère malgache de 3 enfants qui cultive son lopin de terre, employé d’un producteur français de roses en Ethiopie, producteur de fromage dans les Monts du Forez français : l’idée est de se mettre dans la peau de son personnage et de jauger les différentes situations qui dénotent les privilèges de chacun.e, qu’ils soient liés à son genre, sa situation économique, familiale, sociale ou à son pays. Une approche de l’intersectionnalité qui a marqué les joueur.se.s : « je suis frustrée de réaliser que ma situation est difficile, malgré ma volonté, car je suis une femme et que les accords économiques internationaux m’ont oubliée ». Une transition toute faite pour le débat mouvant qui a suivi : « Droits de l’Homme et droits humains, même combat ? ». La controversée thématique de l’écriture inclusive vient rapidement sur la table avant que ne se pose la question de la primauté entre droits humains et droits de la nature. Plusieurs participant.e.s évoquent l’anthropocentrisme problématique et une recommandation de lecture émerge : les (excellentes) BD d’Alessandro Pignocchi.

Défense du territoire et droits humains

Pour la seconde partie de l’atelier, deux groupes sont faits, pour débattre avec Mathieu Salvi du CCFD Terre Solidaire de la souveraineté alimentaire, et avec PBI France, des énergies dites vertes. J’aborde l’accompagnement sur le terrain à Oaxaca (Mexique), d’un collectif d’habitant.e.s qui s’est battu pour permettre une consultation indigène, dans le cadre d’un projet éolien mené par une filiale d’EDF. Un témoignage précieux pour faire le lien entre le « terrain » et notre réalité française. Je reviens également sur la notion des (biens) communs que sont les ressources naturelles et celle de l’extractivisme qui touche de plein fouet l’Amérique latine. Les réflexions émergent, d’autres témoignages enrichissent le débat, notamment sur les métaux rares indispensables aux panneaux photovoltaïques qu’on promeut en France. Le groupe s’arrête quelques minutes sur un questionnement plus que d’actualité : pourquoi les mouvements écolos sont-ils si “blancs” et touchent quasi uniquement les profils socio-économiques élevés en France ? Quelques pistes de lecture sont données, du côté de l’écologie décoloniale.

S’engager dans l’intervention civile de paix

Il est déjà l’heure de conclure en permettant à chacun.e de réfléchir à une action à mener, pour permettre plus de justice climatique. Mathieu aborde une campagne sur l’impunité des multinationales et la loi sur le devoir de vigilance. De mon côté, j’évoque l’intervention civile de paix, au cœur du travail de PBI. Difficile à résumer en quelques minutes mais “l’envoi, à la demande d’acteurs locaux, d’équipes non-armées mais formées à l’analyse des conflits, aux enjeux de sécurité, à l’observation, à la médiation locale pour accompagner les défenseur.e.s de droits humains” est un moyen pragmatique pour répondre à l’urgence sociale et climatique. On peut s’engager comme volontaire comme je l’ai été au Mexique en début d’année et accompagner sur le terrain les défenseur.e.s de l’environnement, mais aussi devenir bénévole en France pour informer et sensibiliser localement aux menaces qui pèsent sur elles et eux. Même à des milliers de kilomètres, il est essentiel ne pas détourner les yeux de ces violations et de participer à renforcer l’intérêt de la communauté internationale pour dissuader les attaques. Et par là-même, s’impliquer pour construire un monde durablement non-violent pour le vivant.

Une volonté partagée par les participant.e.s, curieux.se et très actif.ve.s lors de cet atelier jugé trop court, autant par les participant.e.s que les facilitateur.rices !