Lilian Lizeth Borjas est la secrétaire du Conseil régional du syndicat la Centrale nationale des Travailleurs agricoles (CNTC) de la communauté El Rodeo, El Negrito, Yoro, organisation accompagnée par PBI Honduras. Elle est confrontée aux lois qui cèdent les terres à des projets extractivistes et à des entreprises agro-industrielles, dont la mise en œuvre s’accompagne d’une violence extrême et d’actes d’intimidation.

Depuis 2013, Lilian fait l’objet de pressions importantes de la part de propriétaires terriens lorsque le groupe de paysan.ne.s Triunfo de la Bolsa dont elle fait partie a enclenché un processus de récupération du territoire. En 2012, l’Institut National Agricole (INA) assure qu’il s’agit de terres éjidales, c’est-à-dire qu’elles reposent sur un système de propriété coopérative ou communautaire. Pourtant, l’institution ne se résout pas à leur assigner officiellement le terrain. Les prétendus propriétaires ont quant à eux obtenu, grâce à des reçus de taxes foncières, un document attestant de leur propriété et fourni par le Programme de régulation du bâtiment de l’institut de la Propriété (Programa de Regulación Predial del Instituto de la propiedad (IP)).

En mars 2013, Triunfo de la Bolsa a commencé ce processus de récupération de 62 hectares à El Negrito, Yoro. Pendant les mois qui ont suivi la récupération des terres, iels ont subi de multiples agressions, allant d’insultes racistes et classistes au délogement forcé par des personnes armées.


Militante au CNTC, pour défendre les intérêts paysans

Le CNTC, créé en 1985, est une organisation syndicale régionale de paysan.ne.s qui luttent pour une juste distribution des terres agricoles. Elle est affiliée à la Confédération des travailleuses et travailleurs hondurien.nes et fait partie de la Via campesina. Son but est d’accompagner les familles paysannes pour qu’elles aient accès aux terres et ressources. Le CNTC organise des actions de lutte pour les droits humains, porte des projets éducatifs avec une perspective de genre et pour une agriculture durable. Depuis plusieurs années, les membres du syndicat dénoncent les processus de criminalisation dont certain.e.s sont victimes.
 

Le poids du genre dans les agressions à l’encontre des défenseures

Dans un contexte de forte criminalisation des défenseur.e.s des droits humains, le genre est un marqueur un important. Entre 2013 et 2018, 650 femmes défenseures du territoire font l’objet de procédures pénales. Lilian fait partie de ces centaines de défenseures dans le pays pour avoir défendu leur territoire. En 17 juin 2013, elle ainsi que deux de ses camarades de luttes sont arrêté.e.s, accusé.e.s d’usurpation de terres. En 2019, Lilian aura passé six ans sous mesures judiciaires dites alternatives.
Comme ses compagnons de lutte, elle a fait l’objet d’agressions, insultes racistes et classistes (« pordiosera, hija de puta » …) [1] et menaces. Elle évoque cette forte stigmatisation et criminalisation des femmes défenseures de la communauté, ainsi que les conséquences sur sa famille, sur son état psychologique et sa situation économique. "On peut voir que la criminalisation est plus forte pour moi qui suis femme que celle que peut vivre [un compagnon de lutte] étant homme, et ça m’a surprise. Si je n'ai pas quelqu'un qui peut m'accompagner pour signer [2], je risque de rester en prison."[3]

La spoliation des terres a eu pour effet de renforcer le savoir et la position des femmes grâce aux luttes et leur a également permis de sortir de leur communauté. Leur rôle est central mais pourtant  peu visible pour Lilian Brojas, « Ce sont nous, les femmes qui affrontons ces luttes. Car c’est à nous d’affronter la pauvreté et la misère que nous vivons tous les jours. C’est nous qui allons chercher l’eau pour laver nos enfants. Maintenant, en tant que femmes, nous sommes en train de nous battre contre ces compagnies minières, car c’est nous qui avons besoin de ces ressources naturelles. »
Elle explique simplement qu’elle lutte « pour récupérer ce qui lui appartient, ce qu’on lui a retiré de ses mains. »

L’action de PBI

« La première fois que j'ai été emmenée par la police, je me suis sentie seule, sans personne. Maintenant, je me sens plus protégée grâce à l’accompagnement de mes ami.e.s de PBI ; avec leurs gilets verts, ils font partie de notre réseau et de nos soutiens ».

PBI a participé à faire connaître son cas, révélateur des violences de genre systémiques à l’encontre des femmes défenseures des droits humains au Honduras, et ceux des autres défenseur.e.s du CNTC. Cet appui sur le terrain permet aujourd’hui à Lilian de se sentir plus en sécurité.

Pour nous soutenir et soutenir Lilian, faites un don.

[1]  Communiqué « Solidaridad con la Defensora Lilian Borjas », Centro de derechos de Mujeres https://derechosdelamujer.org/solidaridad-con-defensora-lilian-borjas/
[2] Cela fait 7 ans que Lilian est sous « mesures alternatives » ; d'abord avec l'obligation d'aller signer tous les quinze jours et maintenant une fois par mois. Source: https://pbi-honduras.org/sites/pbi-honduras.org/files/publications/EPU%20ESP.pdf
[3]  LA DEFENSA DE LA TIERRA TIENE NOMBRE DE MUJER, EPU https://pbi-honduras.org/sites/pbi-honduras.org/files/publications/EPU%20ESP.pdf
[4]  « Women human rights defenders on gender based violence », Portraits of Resilience, Hope and Solidarity https://www.youtube.com/watch?v=CU2-57hG2kE&feature=emb_logo
[5]  Propos rapportés par PBI France
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