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PBI et son réseau d'urgence à l'époque du Minitel.

PBI et son réseau d'urgence à l'époque du Minitel.

Octobre 1989. Le téléphone sonne, c’est Michel. Il vient de recevoir un appel d’urgence de PBI. Vite, il me faut noter le message à envoyer (quelques mots en style télégraphique) puis le transmettre par un autre appel téléphonique au maillon suivant de la chaîne de solidarité déjà élaborée, qui à son tour répètera la même procédure. Dès cet appel passé, je vais faire l’envoi du message de protestation vers l’autorité concernée par ces vies qui sont mises en danger dans un pays lointain.

Depuis quelques temps je me suis équipée d’un Minitel, c’est bien pratique. Je peux envoyer mon message sous forme de télégramme sans courir jusqu’au bureau de poste. Il n’est alors pas encore question d’utiliser un fax, il n’y en a encore peu en France et encore moins dans un commissariat du Guatemala ou du Salvador. Le réseau d’urgence auquel je participe est un moyen important de protection et d’action pour les volontaires de PBI et les militants qu’ils accompagnent.

Nous sommes loin de la communication instantanée par simple clic sur une souris. Le réseau d’urgence est alors une organisation artisanale qui compte sur la rigueur de chacun de ses membres. Pour preuve si je ne parviens pas à joindre le maillon suivant du réseau, l’urgence me commande de passer directement à celui d’après, pour que la chaine de solidarité ne s’arrête pas. Je rappellerai l’absent un peu plus tard.

Mon action de militante bénévole consiste ainsi à étoffer ce réseau téléphonique en informant amis, connaissances et autres militants. La tâche demandée est simple : décrocher son téléphone, noter, appeler le militant suivant et envoyer le télégramme demandé. Pour accroitre la rapidité de la réaction d’urgence, chacun peut avoir à appeler deux militants qui a leur tour, en appelleront deux autres.

Lorsque Jean Jacques, ancien volontaire au Guatemala, nous a rapporté combien l’arrivée rapide et massive de ces télégrammes et autres télex sur le bureau d’une autorité locale ou régionale avait du poids, la motivation à faire vivre ce réseau n’en a été que plus grande. Le téléphone peut sonner au milieu de la nuit, nous savons que chaque minute compte, des vies sont en danger sur l’autre rive de l’océan.

Cette modeste participation au réseau d’urgence n’était elle qu’une goûte d’eau face à la multiplicité des oppressions, on peut le penser. Mais lorsque le colibri joint ses forces à de multiples autres colibris, la non-violence devient une réelle force de combat pour les droits humains. A l’époque l’envoi de multiples télégrammes par de simples citoyens sur une cible précise et limitée exerçait un réel rapport de force. Aujourd’hui le contexte est différent, les moyens de communiquer ont changé, le télégramme ne fait plus pression. Le réseau d’urgence est devenu un réseau d’alerte qui exerce autrement le soutien à l’action des volontaires engagés sur le terrain. Les projets se sont multipliés car les demandes de soutien aux personnes menacées sont toujours nombreuses. Fort heureusement le dynamisme, la formation et l’engagement des volontaires permet de répondre aux besoins.

 

Geneviève Lhopiteau, ancienne présidente de PBI France, le 27 juillet 2021.